Structures de contrôle en R

Sophie Baillargeon, Université Laval

2021-03-12

Version PDF de cette page web : struct_controle_r_2021.pdf


Note préliminaire : Lors de leur dernière mise à jour, ces notes ont été révisées en utilisant R version 4.0.3.


La matière vue jusqu’à maintenant dans le cours traitait principalement de l’utilisation du logiciel R dans le but de faire de la manipulation ou de l’analyse de données. Cette utilisation passe par la soumission de commandes dans la console R. En fait, souvent plus d’une commande est nécessaire pour produire le résultat escompté. Plutôt que de soumettre une après l’autre plusieurs commandes dans la console, nous avons appris qu’il était préférable d’écrire des programmes. Renommons « instructions » les commandes apparaissant dans un programme. Lorsqu’un programme R entier est soumis, les instructions qui le composent sont exécutées séquentiellement, c’est-à-dire l’une après l’autre, en respectant leur ordre d’apparition dans le programme.

Comme presque tout langage informatique qui adhèrent au paradigme de programmation impératif, R offre des structures de contrôles (aussi appelées séquencements). Les structures de contrôle sont des instructions particulières qui contrôlent l’ordre dans lequel d’autres instructions d’un programme informatique sont exécutées. Les appels de fonction, présents dans pratiquement toutes les instructions R étudiées dans ce cours jusqu’à maintenant, sont des structures de contrôle. Elles produisent un saut dans l’exécution des instructions d’un programme vers un sous-programme (le corps de la fonction), suivi d’un saut de retour vers le programme principal.

Ce document décrit l’utilisation en R des deux autres structures de contrôle les plus courantes en programmation impérative : les alternatives (structures conditionnelles) et les boucles (structures itératives). Dans les gabarits de code présentés dans cette fiche, les éléments encadrés des signes < et > sont des bouts à remplacer par ce qui convient pour la tâche à accomplir

1 Alternatives

Les alternatives ont pour but d’exécuter des instructions seulement si une certaine condition est satisfaite. Voyons ici deux outils pour créer des alternatives en R : la structure if ... else et la fonction switch.

1.1 Structure if ... else

1.1.1 Écriture générale d’un if ... else

Les mots-clés pour écrire des alternatives en R sont if et else. De façon générale, la syntaxe d’une structure de contrôle if ... else est la suivante.

if (<condition>) {
  <instructions>  # exécutées si l'évaluation de <condition> retourne TRUE
} else {
  <instructions>  # exécutées si l'évaluation de <condition> retourne FALSE
}

Il est possible d’avoir un if sans else.

if (<condition>) {
  <instructions>  # exécutées si l'évaluation de <condition> retourne TRUE
}

Un if doit être suivi d’une paire de parenthèses dans laquelle est inséré une expression R retournant une seule valeur logique (TRUE ou FALSE). C’est la condition de l’alternative. Ensuite viennent la ou les instructions à exécuter si la condition est vraie (c’est-à-dire si l’instruction <condition> produit le résultat TRUE). S’il y a plus d’une instruction à exécuter, les accolades sont nécessaires pour les encadrer. Pour une seule instruction, les accolades sont optionnelles.

Voici un exemple :

# Simulation du lancer d'une pièce de monnaie
lancer <- sample(x = c("Pile", "Face"), size = 1)

# Structure qui affiche ou non un message, en fonction du résultat du lancer
if (isTRUE(lancer == "Pile"))    # sans accolades
  print("Je gagne!")
# ou encore
if (isTRUE(lancer == "Pile")) {  # avec accolades
  print("Je gagne!")
}

Lorsqu’il y a des instructions à exécuter si la condition est fausse, il faut ajouter un else à l’alternative, suivi des instructions en question. Dans ce cas, il est considéré comme une bonne pratique de toujours encadrer les blocs d’instructions d’accolades (sauf si l’écriture condensée, qui sera présentée plus loin, est utilisée), même s’ils sont composés d’une seule instruction, de façon à retrouver le mot-clé else précédé de } et suivi de { .

Voici un exemple :

if (isTRUE(lancer == "Pile")) {
  print("Je gagne!")
} else {
  print("Je perds...")
}

Condition d’un if ... else

La condition d’un if ... else doit donc être une expression R retournant une seule valeur logique (TRUE ou FALSE). En fait, il peut aussi s’agir d’une expression pouvant être convertie en logique (avec la fonction as.logical). Si la condition est de longueur supérieure à 1, un avertissement est généré et seulement le premier élément de la condition est considéré (les autres éléments sont ignorés).

Les opérateurs et fonctions R mentionnées à la section 3.2 des notes sur les calculs mathématiques en R (section intitulée « Conditions logiques de longueur 1 ») sont très utiles pour écrire des conditions d’alternatives. En effet, les opérateurs && et ||, ainsi que les fonctions isTRUE, isFALSE, all, any et toutes les fonctions de la famille des is.*, garantissent la production d’une seule valeur logique.

Dans la condition de l’alternative de l’exemple précédent, l’expression lancer == "Pile" retourne un vecteur logique de la même longueur que le vecteur lancer. Ici, un vecteur de longueur 1 a été assigné à lancer lors de sa création, alors lancer == "Pile" est de longueur 1. Par mesure de précaution, nous avons tout de même encadré l’expression lancer == "Pile" par un appel à la fonction isTRUE afin de s’assurer que la condition de l’alternative soit de longueur 1 peu importe le contexte. Rappelons que la fonction isTRUE retourne TRUE si la valeur qu’elle reçoit en entrée contient des données logiques, est de longueur 1, ne prend pas la valeur NA, mais bien la valeur TRUE. Elle retourne FALSE si au moins une de ses caractéristiques n’est pas rencontrée.

Structures if ... else imbriquées

Plusieurs structures if ... else peuvent être imbriquées. Pour ce faire, il suffit d’insérer une autre structure if ... else à la place de l’accolade suivant le dernier else, comme suit.

if (<condition_1>) {
  <instructions>  # exécutées si <condition_1> retourne TRUE
} else if (<condition_2>) {
  <instructions>  # exécutées si <condition_1> retourne FALSE, mais <condition_2> retourne TRUE
} else {
  <instructions>  # exécutées si <condition_1> et <condition_2> retournent FALSE
}

Notons que la syntaxe précédente est préférée à la suivante, qui est équivalente mais plus lourde.

# Syntaxe non allégée de deux structures if ... else imbriquées
if (<condition_1>) {
  <instructions>  # exécutées si <condition_1> retourne TRUE
} else {
  if (<condition_2>) {
    <instructions>  # exécutées si <condition_1> retourne FALSE, mais <condition_2> retourne TRUE
  } else {
    <instructions>  # exécutées si <condition_1> et <condition_2> retournent FALSE
  }
}

Voici un exemple :

x <- iris$Sepal.Length

# Programme qui calcule des statistiques descriptives simples, selon
# le type des éléments du vecteur sur lequel le calcul est fait
if (is.numeric(x)) {
  c(min = min(x), moy = mean(x), max = max(x))
} else if (is.character(x) || is.factor(x)) {
  table(x)
} else {
  NA
}
##      min      moy      max 
## 4.300000 5.843333 7.900000
# Faisons rouler les instructions de nouveau, après avoir redéfini le vecteur x.

x <- iris$Species

if (is.numeric(x)) {
  c(min = min(x), moy = mean(x), max = max(x))
} else if (is.character(x) || is.factor(x)) {
  table(x)
} else {
  NA
}
## x
##     setosa versicolor  virginica 
##         50         50         50

Il serait pratique de créer une fonction à partir de ce bout de code. Nous le ferons dans les notes sur les fonctions en R.

1.1.2 Écriture condensée d’un if ... else

Lorsque, dans chaque branche d’une alternative if ... else, il n’y a seulement une instruction courte servant à créer un seul objet, l’écriture condensée suivante peut être pratique :

nom <- if (<condition>) <instruction> else <instruction>

Cette écriture est recommandée seulement si elle rend le code plus lisible pour des alternatives très simples.

Voici un exemple :

message <- if (isTRUE(lancer == "Pile")) "Je gagne!" else "Je perds..."

1.1.3 Distinction entre une structure if ... else et la fonction ifelse

Sous sa forme condensée, une structure if ... else fait penser à un appel à la fonction ifelse. Quelles sont les différences entre les deux?

En fait, la fonction ifelse n’est pas une structure de contrôle. Elle teste une condition sur tous les éléments d’un objet et retourne une valeur par élément en fonction du résultat du test. La fonction ifelse accepte comme premier argument (test) un objet atomique logique de dimension quelconque. La dimension de la sortie d’un ifelse est la même que la dimension du premier argument qu’elle reçoit. Cette fonction agit de façon vectorielle.

Supposons que nous voulons vérifier pour chaque élément d’un vecteur nommé x si sa valeur est comprise entre 2.5 et 7.5 exclusivement; si c’est le cas retourner la valeur 5, sinon retourner l’élément de x inchangé. Nous pourrions faire ça avec la fonction ifelse comme suit.

x <- 1:10  # initialisation d'un vecteur x numérique quelconque

ifelse(test = x > 2.5 & x < 7.5, yes = 5, no = x)
##  [1]  1  2  5  5  5  5  5  8  9 10

Si, par erreur, nous avions utilisé la structure if ... else au lieu de la fonction ifelse pour réaliser cette tâche, nous aurions obtenu ce qui suit.

if (x > 2.5 & x < 7.5) 5 else x
## Warning in if (x > 2.5 & x < 7.5) 5 else x: the condition has length > 1 and
## only the first element will be used
##  [1]  1  2  3  4  5  6  7  8  9 10

Remarquons premièrement qu’un avertissement a été généré, car la condition dans la structure if ... else n’est pas de longueur 1. Seul le premier élément du vecteur créé par l’expression x > 2.5 & x < 7.5 a été utilisé.

x > 2.5 & x < 7.5
##  [1] FALSE FALSE  TRUE  TRUE  TRUE  TRUE  TRUE FALSE FALSE FALSE

Ce premier élément est FALSE. Ainsi, c’est l’instruction après le else de l’alternative qui a été exécutée. Donc x a été retourné intacte.

Si nous avions utilisé l’opérateur logique && au lieu de & dans la condition, nous n’aurions pas obtenu d’avertissement, mais le même résultat aurait été retourné.

if (x > 2.5 && x < 7.5) 5 else x
##  [1]  1  2  3  4  5  6  7  8  9 10

L’opérateur && a restreint l’évaluation de la condition au premier élément de x (les autres éléments ont été ignorés).

x > 2.5 && x < 7.5
## [1] FALSE

1.2 Fonction switch

La fonction switch est parfois utile pour remplacer plusieurs structures if ... else imbriquées. La syntaxe générale d’un appel à la fonction switch est la suivante.

switch(
  <expression>,
  "resultat_1" = {
    <instructions> # exécutées si <expression> retourne "resultat_1"
  },
  "resultat_2" = {
    <instructions> # exécutées si <expression> retourne "resultat_2"
  },
  .
  .  # autres paires (résultat, instructions à exécuter) s'il y a lieu
  .
  {
    <instructions> # exécutées si <expression> retourne tout autre résultat
  }
)

Dans cette syntaxe générale, la valeur fournie au premier argument, représentée par <expression>, doit être une instruction R retournant une chaîne de caractères. Les autres arguments de la fonction doivent porter les noms de ce que peut produire en sortie <expression>. Les valeurs fournies à ces arguments sont les instructions à exécuter si <expression> retourne une chaîne de caractères égale au nom de l’argument. Si un dernier argument non assigné à un nom est fourni, il sera exécuté si <expression> retourne une chaîne de caractères ne se retrouvant pas parmi les noms d’arguments présents dans l’appel à la fonction switch. Notons que lorsqu’un résultat doit provoquer l’exécution d’une seule instruction, celle-ci n’a pas à être encadrée d’accolades.

Voici un exemple :

x <- iris$Sepal.Length

# Structures if ... else imbriquées présentées précédemment, à reproduire
if (is.numeric(x)) {
  c(min = min(x), moy = mean(x), max = max(x))
} else if (is.character(x) || is.factor(x)) {
  table(x)
} else {
  NA
}
##      min      moy      max 
## 4.300000 5.843333 7.900000
# Appel à la fonction switch équivalent
switch(
  class(x),
  "numeric"   = c(min = min(x), moy = mean(x), max = max(x)),
  "integer"   = c(min = min(x), moy = mean(x), max = max(x)),
  "character" = table(x),
  "factor"    = table(x),
  NA
)
##      min      moy      max 
## 4.300000 5.843333 7.900000

Dans cet exemple, <expression> est l’instruction class(x). Celle-ci retourne "numeric" pour un vecteur x contenant des données de type réel, mais retourne "integer" pour un vecteur x contenant des données de type entier. La condition is.numeric(x) retourne quant à elle TRUE pour tout vecteur numérique x, que ses données soient réelles ou entières. Afin de créer un appel à la fonction switch équivalent aux structures if ... else imbriquées à reproduire, il fallait donc définir les résultats "numeric" et "integer". Les deux solutions implémentent la même alternative aussi parce que is.character(x) est équivalent à class(x) == "character" et is.factor(x) est équivalent à class(x) == "factor".

Notons que <expression> peut aussi retourner un entier, interprété comme le numéro du bloc d’instructions à exécuter. Par exemple, si <expression> produit le résultat 2 lorsqu’exécuté, c’est le deuxième bloc d’instructions (troisième argument fourni à la fonction switch) qui sera exécuté. Dans ce cas, les blocs d’instructions n’ont pas besoin d’être assignés à des noms. L’appel à la fonction switch suivant est donc aussi équivalent aux structures if ... else imbriquées présentées dans l’exemple précédent.

switch(
  if (is.numeric(x)) 1 else if (is.character(x) || is.factor(x)) 2 else 3,
  c(min = min(x), moy = mean(x), max = max(x)),
  table(x),
  NA
)

2 Boucles

Les boucles ont pour but de répéter des instructions à plusieurs reprises, c’est donc dire de les itérer. Parfois, le nombre d’itérations à effectuer est connu d’avance. D’autres fois, ce nombre d’itérations n’est pas connu d’avance, car il dépend d’une condition à rencontrer.

2.1 Boucles for

Lorsque le nombre d’itérations à effectuer est prédéterminé, une boucle for est tout indiquée.

Écriture générale d’une boucle for :

for (<iterateur> in <ensemble>) {
  <instructions>  # exécutées à chaque itération de la boucle
}

Ce type de boucle débute par le mot clé for, suivi des éléments suivants, dans l’ordre :

  • une parenthèse ouvrante;
  • un nom quelconque, représenté par <iterateur> dans la syntaxe générale;
  • le mot-clé in;
  • une instruction retournant un vecteur contenant l’ensemble des valeurs sur lesquelles itérer, représenté par <ensemble> dans la syntaxe générale;
  • une parenthèse fermante.

Ensuite viennent la ou les instructions à répéter. S’il y a plus d’une instruction à répéter, les accolades sont nécessaires pour les encadrer. Dans ces instructions, l’objet nommé <iterateur> dans la syntaxe générale intervient généralement.

La boucle effectue autant de répétitions que la longueur du vecteur <ensemble>.

  • Première itération : <iterateur> prend la valeur <ensemble>[[1]].
  • Deuxième itération : <iterateur> prend la valeur <ensemble>[[2]].
  • \(\vdots\)
  • Dernière itération : <iterateur> prend la valeur <ensemble>[[length(<ensemble>)]].

Ainsi, de façon générale, pour les itérations i allant de 1 à length(<ensemble>), valeur contient <ensemble>[[i]].

Voici un exemple :

for (lettre in LETTERS) {
  cat(lettre, " ")
}
## A  B  C  D  E  F  G  H  I  J  K  L  M  N  O  P  Q  R  S  T  U  V  W  X  Y  Z

Dans cet exemple, nous avons effectué 26 itérations, car length(LETTERS) == 26. À l’itération i, nous avons affiché le ie élément du vecteur LETTERS, soit la ie lettre de l’alphabet.

Nous aurions pu effectuer exactement la même boucle en itérant sur les entiers de 1 à 26 comme suit :

for (i in seq_along(LETTERS)) {
  cat(LETTERS[[i]], " ")
}
## A  B  C  D  E  F  G  H  I  J  K  L  M  N  O  P  Q  R  S  T  U  V  W  X  Y  Z

Lorsque nous choisissons d’itérer sur les entiers allant de 1 au nombre total d’itérations à effectuer (disons n), il est commun d’utiliser le nom i pour l’objet changeant de valeur au fil des itérations. Le vecteur <ensemble> est alors souvent créé par l’instruction 1:n, mais il est plus prudent d’utiliser seq_len(n) qui retournera une erreur si n est négatif ou un vecteur vide si n == 0. Si le nombre d’itérations à effectuer n est égal à la longueur d’un objet, disons a, il est recommandé de créer le vecteur <ensemble> par l’instruction seq_along(a). Pour un objet a de longueur non nulle, les instructions 1:length(a) et seq_along(a) retournent exactement le même résultat, comme l’illustre cet exemple.

1:length(LETTERS)
##  [1]  1  2  3  4  5  6  7  8  9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
seq_along(LETTERS)
##  [1]  1  2  3  4  5  6  7  8  9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26

Cependant, si l’objet a s’adonne à être de longueur nulle, l’utilisation de seq_along(a) nous assure que la boucle n’effectue aucune itération. L’utilisation de 1:length(a) entraînerait plutôt une itération sur i = 1, puis i = 0, qui risquerait de générer une erreur. Ce comportement s’explique par le fait que 1:length(a) retourne dans ce cas particulier le vecteur (1, 0).

a <- list()  # supposons que a est une liste vide
1:length(a)
## [1] 1 0
seq_along(a)
## integer(0)

Autre exemple:

Voici un exemple de boucle for, utilisant le jeu de données attitude (provenant du package datasets)

str(attitude)
## 'data.frame':    30 obs. of  7 variables:
##  $ rating    : num  43 63 71 61 81 43 58 71 72 67 ...
##  $ complaints: num  51 64 70 63 78 55 67 75 82 61 ...
##  $ privileges: num  30 51 68 45 56 49 42 50 72 45 ...
##  $ learning  : num  39 54 69 47 66 44 56 55 67 47 ...
##  $ raises    : num  61 63 76 54 71 54 66 70 71 62 ...
##  $ critical  : num  92 73 86 84 83 49 68 66 83 80 ...
##  $ advance   : num  45 47 48 35 47 34 35 41 31 41 ...

Ce jeu de données contient 7 variables numériques. Ces données ont été recueillies dans le but d’étudier les variables influençant la cote (rating) reçue par 30 départements d’une grande organisation financière. Supposons que nous souhaitons réaliser 6 régressions linéaires simples sur ces données. Toutes les régressions auraient la même variable réponse, rating (en position 1), et la variable explicative devrait être tour à tour une des autres variables du jeu de données.

L’instruction pour réaliser la régression simple avec la variable complaints par exemple, serait la suivante :

lm(rating ~ complaints, data = attitude)
# ou
lm(rating ~ ., data = attitude[, c(1, 2)])
## 
## Call:
## lm(formula = rating ~ ., data = attitude[, c(1, 2)])
## 
## Coefficients:
## (Intercept)   complaints  
##     14.3763       0.7546

Nous souhaitons maintenant insérer cette instruction dans une boucle permettant d’effectuer les 6 régressions simples.

modeles <- vector(length = ncol(attitude) - 1, mode = "list")
for (i in seq_len(ncol(attitude) - 1)) {
  modeles[[i]] <- lm(rating ~ ., data = attitude[, c(1, i + 1)])
}
modeles
## [[1]]
## 
## Call:
## lm(formula = rating ~ ., data = attitude[, c(1, i + 1)])
## 
## Coefficients:
## (Intercept)   complaints  
##     14.3763       0.7546  
## 
## 
## [[2]]
## 
## Call:
## lm(formula = rating ~ ., data = attitude[, c(1, i + 1)])
## 
## Coefficients:
## (Intercept)   privileges  
##     42.1087       0.4239  
## 
## 
## [[3]]
## 
## Call:
## lm(formula = rating ~ ., data = attitude[, c(1, i + 1)])
## 
## Coefficients:
## (Intercept)     learning  
##     28.1741       0.6468  
## 
## 
## [[4]]
## 
## Call:
## lm(formula = rating ~ ., data = attitude[, c(1, i + 1)])
## 
## Coefficients:
## (Intercept)       raises  
##     19.9778       0.6909  
## 
## 
## [[5]]
## 
## Call:
## lm(formula = rating ~ ., data = attitude[, c(1, i + 1)])
## 
## Coefficients:
## (Intercept)     critical  
##     50.2446       0.1924  
## 
## 
## [[6]]
## 
## Call:
## lm(formula = rating ~ ., data = attitude[, c(1, i + 1)])
## 
## Coefficients:
## (Intercept)      advance  
##     56.7558       0.1835

2.2 Enregistrement des résultats dans une boucle

Une affectation de valeur à un endroit précis d’un objet (ex.: modeles[[i]] <- lm(...)) nécessite que l’objet existe préalablement. Ainsi, une boucle est souvent précédée par l’initialisation d’un objet dédié à contenir les résultats calculés dans la boucle. Dans l’exemple précédent, nous avons initialisé la liste modeles avant la boucle par l’instruction :

modeles <- vector(length = ncol(attitude) - 1, mode = "list")

Remarquons que la fonction vector crée bien une liste ici, et non un vecteur, grâce à l’argument mode = "list". Après tout, les listes sont des vecteurs récursifs.

Nous aurions pu choisir d’itérer sur les noms des variables explicatives plutôt que sur les entiers 1 à 6, comme suit :

modeles <- vector(length = ncol(attitude) - 1, mode = "list")
names(modeles) <- setdiff(names(attitude), "rating")

for (variable in names(modeles)) {
  modeles[[variable]] <- lm(rating ~ ., data = attitude[, c("rating", variable)])
}

Dans ce cas, nous avons préalablement nommé les éléments de la liste initialement vide. Ainsi, dans la boucle, nous pouvons référer à des éléments spécifiques de la liste modeles par leur nom plutôt que par leur indice.

2.3 Affichage de résultats dans une boucle

Voici une boucle très simple.

for (i in seq_len(5)) {
  i
}

Si vous soumettez cette boucle, vous remarquerez qu’elle n’affiche rien. Pourtant, une instruction contenant uniquement le nom d’un objet affiche cet objet lorsque l’instruction est soumise dans la console.

i
## [1] 5

Ce résultat ne se produit pas dans une boucle. Il faut utiliser les fonctions print ou cat pour qu’un résultat soit affiché dans la console pendant l’exécution d’une boucle.

for (i in seq_len(5)) {
  print(i)
}
## [1] 1
## [1] 2
## [1] 3
## [1] 4
## [1] 5
for (i in seq_len(5)) {
  cat(i)
}
## 12345

cat est utile pour faire afficher une trace des itérations.

for (i in seq_len(5)) {
  cat("itération", i, "terminée\n")
}
## itération 1 terminée
## itération 2 terminée
## itération 3 terminée
## itération 4 terminée
## itération 5 terminée

Rappel : Le caractère \n représente un retour à la ligne.

2.4 Boucles while ou repeat

Parfois, le nombre d’itérations dépend d’une condition à rencontrer, il n’est pas prédéterminé. Les boucles R while et repeat sont utiles dans cette situation.

Écriture générale d’une boucle while :

while (<condition>) {
  <instructions>  # exécutées à chaque itération de la boucle
}

Écriture générale d’une boucle repeat :

repeat {
  <instructions>  # exécutées à chaque itération de la boucle
  if (!<condition>) {
    break
  }
}

Un des intérêts d’une boucle repeat est de tester la condition après avoir exécuté les instructions et non avant comme dans une boucle while. Dans un boucle repeat, le mot-clé break doit être utilisé pour mettre fin aux itérations, sinon la boucle est infinie.

La <condition> doit encore une fois être une instruction qui retourne une seule valeur logique (TRUE ou FALSE).

Dans les écritures générales ci-dessus, remarquez qu’il y a un opérateur logique de négation devant la condition dans la boucle repeat. C’est pour mettre en évidence le fait qu’une boucle while continue d’itérer tant que <condition> demeure TRUE. Pour une même <condition>, il faut donc faire arrêter la boucle repeat lorsque <condition> devient FALSE.

Voici un exemple.

Nous souhaitons simuler le lancer d’un dé jusqu’à l’obtention d’un 6 et compter le nombre de lancers.

resultat <- 1   # initialisation à un résultat quelconque, différent de 6
n_lancers <- 0  # initialisation à 0 du nombre de lancer
while (resultat != 6) {              # tant que le résultat n'est pas égal à 6, répéter
  resultat <- sample(1:6, size = 1)  # simulation du lancer du dé
  n_lancers <- n_lancers + 1         # incrémentation du nombre de lancers
}
n_lancers       # afficher le résultat final

La boucle while peut être remplacée par une boucle repeat avec le mot-clé break comme suit.

n_lancers <- 0
repeat {
  resultat <- sample(1:6, size = 1)
  n_lancers <- n_lancers + 1
  if (isTRUE(resultat == 6)) {
    break
  }
}
n_lancers

Ici, nous n’avons pas besoin d’initialiser resultat, car la condition est évaluée à la fin de la boucle, après avoir calculé resultat au moins une fois.

Remarque : Si les instructions dans une boucle while ou repeat n’ont aucun impact sur la <condition> et que celle-ci demeure toujours vraie, alors la boucle est infinie. Il est important de s’assurer que la <condition> devienne éventuellement fausse, afin que la boucle puisse s’arrêter.

2.5 Imbriquer des boucles

Dans l’exemple précédent, il serait intéressant de répéter l’expérience un grand nombre de fois et de calculer le nombre moyen de lancers requis pour obtenir un 6. Pour ce faire nous pourrions imbriquer la boucle while ou repeat dans une boucle for comme suit :

n_rep <- 10000
n_lancers <- rep(0, n_rep)  # ou vector(length = n_rep, mode = "numeric")
for (i in 1:n_rep) {
  resultat <- 1 
  while (resultat != 6) {
    resultat <- sample(1:6, size = 1)
    n_lancers[i] <- n_lancers[i] + 1
  }
}
mean(n_lancers)
## [1] 6.025

Cet exemple montre une façon empirique d’estimer l’espérance d’une variable aléatoire suivant une distribution géométrique de paramètre p = 1/6. Plus grand est le nombre de répétitions, plus l’estimation est précise (convergence). En théorie, cette espérance vaut 1/p = 6.

Il est simple d’imbriquer des boucles en R, peu importe leur type (for, while ou repeat). Cependant, nous verrons plus tard que plus l’imbrication possède de niveaux, plus le programme tend à être long à exécuter.

2.6 Mots-clés break et next

Deux mots-clés existent pour contrôler l’exécution des instructions à l’intérieur d’une boucle :

  • break : pour terminer complètement l’exécution de la boucle (les itérations restantes ne sont pas effectuées).

  • next : pour terminer immédiatement une itération (sans exécuter les instructions après le mot-clé next) et reprendre l’exécution de la boucle à la prochaine itération.

Ces deux mot-clés sont pratiquement toujours utilisés dans une structure if.

Le mot-clé break a déjà été illustré dans une boucle repeat. Notons cependant que nous pouvons l’utiliser dans une boucle de n’importe quel type.

Illustrons maintenant l’utilisation du mot-clé next. Reprenons l’exemple de l’affichage des lettres de l’alphabet. Supposons que nous souhaitons afficher seulement les consonnes.

for (lettre in LETTERS) {
  if (isTRUE(lettre %in% c("A", "E", "I", "O", "U"))) {
    next
  }
  cat(lettre, " ")
}
## B  C  D  F  G  H  J  K  L  M  N  P  Q  R  S  T  V  W  X  Y  Z

Dans ce programme, si la condition isTRUE(lettre %in% c("A", "E", "I", "O", "U")) est rencontrée, nous passons à l’itération suivante de la boucle, sans soumettre l’instruction cat(lettre, " "). Le mot-clé next permet donc d’omettre l’exécution de certaines instructions.

En fait, le dernier programme fait la même chose que le programme suivant.

for (lettre in LETTERS) {
  if (isFALSE(lettre %in% c("A", "E", "I", "O", "U"))) {
    cat(lettre, " ")
  }
}
## B  C  D  F  G  H  J  K  L  M  N  P  Q  R  S  T  V  W  X  Y  Z

Ici, il n’y a plus de mot-clé next, mais l’instruction cat(lettre, " ") est dans le if plutôt qu’après le if.

Nous avons souvent constaté qu’il y a plusieurs façons de réaliser une même tâche en R. Cette remarque est aussi vraie pour les boucles.

2.7 Interruption de l’exécution d’une boucle

Il peut arriver que, par erreur, nous soumettions en R une boucle vraiment longue à rouler, possiblement infinie. En RStudio, l’exécution de n’importe quelle commande, incluant une boucle, peut être interrompue d’une des façons suivantes :

  • la touche « Esc »,
  • le bouton STOP en entête à droite de la sous-fenêtre de la console R (dans un petit logo de panneau d’arrêt rouge de forme octogonale),
  • le menu « Session > Interrupt R ».

2.8 Éviter les boucles

Une des philosophies de base en programmation R est d’utiliser une boucle seulement si celle-ci est vraiment nécessaire pour réaliser la tâche à accomplir. Le fonctionnement vectoriel de plusieurs fonctions R, ainsi que les fonctions de la famille des apply, permettent bien souvent d’éviter l’utilisation d’une boucle.

Cette philosophie se base sur les faits suivants :

  • le calcul vectoriel est plus rapide que les boucles;
  • éviter les boucles produit habituellement un code plus court, donc plus rapide à écrire et aussi potentiellement plus facile à comprendre.

2.8.1 Calcul vectoriel versus boucle

Voici un exemple simple d’opération vectorielle. Supposons que nous avons le vecteur numérique x suivant.

x <- 1:10

Nous voulons élever au carré toutes les valeurs dans ce vecteur. En R, il est recommandé de réaliser cette tâche comme suit :

z <- x^2
z
##  [1]   1   4   9  16  25  36  49  64  81 100

Dans bien des langages informatiques, il aura fallu faire une boucle, telle que celle-ci :

z <- vector(length = length(x), mode = "numeric")
for (i in seq_along(x)) {
  z[i] <- x[i]^2
}
z
##  [1]   1   4   9  16  25  36  49  64  81 100

Laquelle des deux solutions vous paraît la plus simple à comprendre?

2.8.2 Fonction de la famille des apply versus boucle

Voici un exemple simple d’utilisation d’une fonction de la famille des apply. Supposons que nous avons la matrice numérique mat suivante.

mat <- matrix(1:12, ncol = 3, nrow = 4)
mat
##      [,1] [,2] [,3]
## [1,]    1    5    9
## [2,]    2    6   10
## [3,]    3    7   11
## [4,]    4    8   12

Nous voulons calculer les sommes des valeurs par colonne. En R, il est recommandé de réaliser cette tâche comme suit :

sommesColonnes <- colSums(mat)
sommesColonnes
## [1] 10 26 42

La fonction colSums revient à un appel à la fonction apply optimisé pour la tâche spécifique du calcul de sommes en colonnes.

Dans bien des langages informatiques, il aurait fallu faire une boucle, telle que celle-ci :

sommesColonnes <- vector(length = ncol(mat), mode = "numeric")
for (i in 1:ncol(mat)) {
  sommesColonnes[i] <- sum(mat[, i])
}
sommesColonnes
## [1] 10 26 42

En termes de temps de travail requis pour écrire le code, il est plus rapide d’appeler la fonction colSums que d’écrire cette boucle. Aussi, le code avec l’appel à la fonction colSums est plus succinct, donc potentiellement plus simple à comprendre.


3 Résumé

Alternatives

Structure if ... else

if (<condition>) {
 <instructions>  # exécutées si <condition> est TRUE
} else {
 <instructions>  # exécutées si <condition> est FALSE
}
  • <condition> = expression qui retourne un seul logique (TRUE ou FALSE).

Écriture condensée d’une alternative :

x <- if (<condition>) <instruction> else <instruction>
  • Ce n’est pas la même chose que la fonction ifelse, qui travaille de façon vectorielle.
Fonction switch

switch(
  <expression>,
  "resultat_1" = {
    <instructions> # exécutées si <expression> retourne "resultat_1"
  },
  "resultat_2" = {
    <instructions> # exécutées si <expression> retourne "resultat_2"
  },
  .
  .  # autres paires (résultat, instructions à exécuter) s'il y a lieu
  .
  {
    <instructions> # exécutées si <expression> retourne tout autre résultat
  }
)

Boucles

for (<iterateur> in <ensemble>) {
  <instructions>
}
while (<condition>) {
  <instructions>
}
repeat {
  <instructions>
  if (!<condition>) {
    break
  }
}
  • for : boucle ayant un nombre prédéterminé d’itérations,
  • while : boucle arrêtant lorsqu’une condition n’est plus rencontrée,
  • repeat : boucle nécessitant le mot-clé break pour arrêter,
  • break : mot-clé pour terminer l’exécution de la boucle,
  • next : mot-clé pour sauter à la prochaine itération sans exécuter les instructions après le mot-clé.

À noter :

  • Une boucle est souvent précédée par l’initialisation d’un objet dédié à contenir les résultats calculés dans la boucle.
  • Il faut utiliser les fonctions print ou cat pour qu’un résultat soit affiché dans la console pendant l’exécution d’une boucle.
  • Il est recommandé d’utiliser des boucles seulement si nécessaire, de favoriser les calculs vectoriels et l’utilisation des fonctions de la famille des apply.

Références